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Ailleurs

"Je me retrouvais dans la rue, au pied de l'immeuble qui paraissait gigantesque. Tout me paraissait immense en fait, j'étais un fantôme dans ces rues. Les passants se pressaient, entraient et sortaient des magasins, chargés de leurs emplettes qui étaient, je suis sûr, à 60 % inutiles. Tous avaient une joie qui devait avoir été peinte par un artiste ennuyé. J'étais, je dois avouer, assez jaloux de la quiétude qu'ils avaient tous. C'était une fausse quiétude, mais de la quiétude quand même. Bordel, il fallait que je rentre, au pire j'irais dans ma chambre d'hôtel et on me retrouverait pendu ou noyé, un petit écrivain mort tragiquement à cause du poids la vie, ça me ferait même plus de pub et de bénéfice que j'en faisais maintenant, et au mieux, je m’assiérais à ma terrasse, je regarderais passer les gens et je réfléchirais. Cette pensée me fit sourire. C'était souvent les choses les plus noires qui me faisaient rire, mais comme un ami m'avait dit « Il vaut mieux rire du mal que d'en avoir peur ». Je remuais toutes ces pensées, doucement, comme un mage remuerait une concoction mystique qui rendrait euphorique, et ce fut donc un brutal retour sur terre que je subis lorsque je percutais un lampadaire. Sur le cul, je regardais autour de moi, à ma droite un taxi passait, avec à son bord une femme et son chien qui me regardait d'un air absent, à ma droite, il y avait l'entrée d'un restaurant, à la façade neuve et aux odeurs de hautes gastronomie. Le pire dans tout ça, ce n'est pas que sur le trottoir, un jeune homme d'une vingtaine d'années, vêtu d'une façon relativement classe était assis par terre comme un enfant qui ne sais pas marcher et retombe sur les fesses, non, le pire était qu'autour de lui, la foule ne faisait que s'écarter, de par un égard de gentillesse pour ne pas lui marcher dessus.

C'est tout. C'est tout ce qu'on fait dans se monde, tomber et essayer de se relever. À cet instant, je regrettais d'avoir jeter les fleurs, au moins, elles avaient une odeur plus agréable que la zone urbaine. Un vieillard, cliché du noir provenant d'un quartier défavorisé américain mais au cœur grand, barbe grise et yeux pétillants, se dirigea vers moi, me tendant la main.
 

« - Faut pas rester assis par terre mon ami, quelqu'un finira par te marcher dessus. Et puis le sol est sale ! »


Je le regardais, hébété, balbutiant je ne sais quoi. Ma fierté mal placée me jouais des tours, ou alors je n'avais pas totalement retrouvé mes esprits. Enfin, mon esprit (c'est vrai, on n'a qu'un seul esprit non?).

Insistant, il agita sa main sous mon nez, et une fois remis sur pied, j'ouvris la bouche pour le remercier. Sauf que c'est dur de remercier quelqu'un qui n'est plus là. Disparu, comme pleins de gens. Des passages, des rencontres et des au revoir. Je rentrais à l'hôtel, faisant gaffe à ne pas tomber encore une fois.

J'ouvris la porte du hall d'entrée, me dirigeais précipitamment à ma chambre, fuyant les gens autours de moi. Du calme ! Je me battis avec les clés, ouvris la porte, la claquais, et enfin, je pus m'affaler au sol, sans crainte, déversant des larmes malgré moi. Une fois asséché, je pris la direction de la salle de bain, j'avais eu la chance d'en avoir une avec une cabine/baignoire, et c'est rapidement que je fis couler de l'eau brûlante et que je m'y plongeais. La pièce était d'un faux luxe consternant... Je regrettais déjà mon appartement. Je regrettais surtout les gens qui y vivaient avec moi. J'y avais vécu 9 mois. 9 mois, le temps qu'il faut à une femme pour concevoir un enfant, ou bien la période qu'avait durée mon infructueuse période d'essai dans le cabinet d'assurance du boulevard « illuminé par toutes les enseignes qu'il y avait » comme disait Josie, une de mes amies du passé. C'est vrai que de jour comme de nuit, la luminosité était toujours présente, je trouvais ça débile d'ailleurs, ça coûtait trop cher et ça gaspillait de l'énergie... Ma tête était dans un monde, le reste de mon corps dans une autre. Je serais bien resté ici le restant de mes jours, mais c'est pas pratique pour certaines choses. En tournant la clé de mon ancien chez moi, j'avais pensé me mettre au sport (genre de promesse qu'on tient rarement), mais j'avais surtout pensé à trouver une nouvelle vie. J'avais dis que je voyagerais. Sauf que là, je n'avais plus vraiment de volonté, j'étais invisible, le monde autour de moi était comme une étoile filante : à peine je rencontrais quelqu'un qu'il disparaissait. Si chaque choses de l'Univers était rattachées par des milliers de fils, et bien moi, quelqu'un avait coupé ceux qui me liaient aux autres. C'est dans ces plaintes intérieures que je m'endormis, d'un coup, pour dessiner d'une main tremblante un monde où j'étais bien. [...] "

par Mr. Kanard

 

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