Escapade - 2
" Une heure après avoir déambulé dans les rues, mon baluchon sur l'épaule droite, j'avais traversé une petite forêt, hantée par le souffle du vent qui acclamait ma liberté en faisant bruisser les branches et les feuilles. L'ambiance chaude de la nuit s'accordait à mon exaltation, un sentiment fébrile qui parcourait mon corps de part en part comme un feu follet ou un courant électrique. J'étais ici, mais je me voyais déjà bien loin de là . Ma traversée prit fin lorsque je compris au bruit, que l'autoroute déroulait devant mes yeux, des sphères jaunes s'y déplaçant de part en part. Franchir la bannière de sécurité conclurait définitivement ma prise de liberté. À la lisière entre deux mondes, la tranquille forêt qui m'avait guidé et ce long chemin bruyant qui représentait mon échappatoire. Je goûtais avec délice ces émotions, cette sensation de réellement arriver à la Vie, de retirer un énorme étau qui compressait le coeur et l'esprit, et les étoiles présentes étaient les témoins de mon passage, elles, au moins, me voyaient depuis l'Univers. Je me lançais et me dirigeais vers la barrière, que j'enjambais en manquant de faire tomber mes affaires. Je me collais le plus possible à celle-ci, mais je pouvais sentir les rafales des voitures qui avalaient impitoyablement la route, à moins que ce soit l'inverse et la route qui avale les voitures. Mon coeur battait fort, et pris par les événements, je levais ma main et mon pouce droit pour demander, à la personne assez compréhensive et gentille qui passerait, de m'emmener loin d'ici. La vitesse exprimait convenablement le dédain qu'avaient la plupart des conducteurs, soit ils me regardaient avec un air de fausse pitié, soit ils traçaient encore plus vite. Mais je maintenais inlassablement le pouce gauche ou droit debout, j'étais sûr que quelqu'un serait là , et c'est en gardant toute ma volonté, avec des fourmis dans les bras, qu'une berline s'arrêta sur le côté réservé aux urgences. Le voyage commençait vraiment. [...] "
par Mr. Kanard