Incompréhensible - 3
par Mr. Kanard
Un nouveau jour commence. La fatigue, les insomnies. Il tend ses doigts, essaye d'attraper un rayon de Soleil... Il a les cheveux coupés en un semblant de dégradé, et ce réflexe de toujours passer sa main dedans, ode au temps où il les avait longs. Il repousse les draps, s'étirent, fait craque ses bras, ses doigts. D'un coup d’œil, il attrape son ordi et l'allume, met de la musique.
C'est monotone comme vie... Il arrêterait bien tout ça, mais il a peur du suicide, la Mort le dégoûte et l'effraie. Il pense. Des larmes affluent, il sent ses yeux se gonfler sous la pression, la brûlure des gouttes qui perlent et s'échappent. Sans un bruit, il pleure, boit une gorgée de rhum et va dans sa salle de bain. Il se regarde dans le miroir, il regarde ses yeux rougis alors qu'il n'a même pas fumé de joints. Ses pensées sont folles aussi, alors qu'il n'a toujours pas fumé. C'est le bordel. Des poils drus parsèment son menton, la lumière jaunissante fait penser à un mauvais film d'horreur.
« Merde ! Maintenant, je me ressaisis ! » il hurle. Après ce cri, la musique s'arrête. Comme un con, il a oublié de faire une liste de lecture. Comme si un ordi, capable de faire des millions de calculs, ne pouvait se douter qu'on voulait une autre musique après celle sélectionnée, puis encore une autre. Ce n'est qu'un ordi. Ce ne sont que des pensées.
Imaginez, un champs qui s'étire sous les nuages gris comme les enfants se cachent sous le préau de leur cours, immense étendue, qui donne une bonne acoustique à un bruit suffisamment bien amplifié. Imaginez le ciel qui fait filer les nuages, ça fait penser à des images, un film, qui défile à l'horizontale, à la suite. Imaginez un immense coup de tonnerre, qui semble se répercuter dans chaque atomes du Ciel, des nuages et du champs. Le bruit parcours l'espace, impossible de l'arrêter. Puis le silence. Et là on peut se dire que le silence peut être comme l'un des sons les plus puissants. C'était ça qu'il avait ressenti, après ce cri. Un calme désarçonnant, comme si un Juif serrait la main à un Musulman dans une rue d'Israël, magique mais incroyable ! C'était ça.
Je crois qu'une main invisible venait d'allumer un feu, de projeter ses étincelles dans le cœur de ce gars.
Il fouilla dans le placard sous le lavabo, et fit couler l'eau. Sortant lame et mousse, il se mit torse nu, jetant un dernier regard à sa carcasse qui ne nourrirait même pas les vautours, et s'attaqua à son image, comme un artiste qui fait des collages et des découpages, pour créer la parfaite osmose.