Incompréhensible .2
par Mr. Kanard
Il ouvre la porte d'entrée, regarde la rue vide et brumeuse, le jour est beau, le temps est froid. Le ciel bleu se distingue derrière ces volutes fraîches, d'ailleurs, il n'a même pas encore allumé sa cigarette que la fumée lui sors déjà de la bouche. Ses doigts s'agitent mal, ils sont comme rouillés, et l'engrenage de son esprit est tout aussi long à la détente. Il s'assied sur les marches du perron, après maints essais, il parvient enfin à allumer sa clope. D'un regard vide, il observe ce qui l'entoure. La voiture grise du vieux d'en face, les trottoirs sur lesquels s'amassent mégots et papiers, les pavillons fleuris, qui ne parviennent qu'à qui le regarde, faisant comme si de rien n' était, écartant ou repoussant les rideaux, le scrutant, comme un parano. Ça le rend fou. Qu'on l'observe comme ça, alors qu'il n'avait aucun intêrets. Merde, il pouvait pas être tranquille ?!
D'un air rageur, il saisit un cailloux, qu'il lança jusqu'à la fenêtre. Rien de méchant, juste un « Clong ! » qui indiquait que le projectile avait touché sa cible. Le vieux lui fait un doigt d'honneur . Il répond de même.
Son mégot écrasé, il se lève, rentre pour mettre un pull, et 10 minutes plus tard, il est dehors, la clé en main, verrouille et part marcher. Il ne peut pas s'empêcher de grelotter, alors il s'amuse à cracher la buée, comme si il était toujours en train de fumer.
« Je brûle de l'intérieur » pensa t-il.
- Je me consume, petit à petit...
Lui n'est plus du genre à s'imaginer des voyages et de longues routes, sinueuses mais parsemées de belles surprises. Aussi belles que la fille qui est sur le trottoir d'en face. Il jette un regard vers elle, qui ne le voit pas, du moins c'est ce que les lunettes de soleil se plaisent à penser... C'était un dur, une tombe de marbre, le souvenir d'une personne, sans la personne.
Se lamenter, marcher, pour, au final, aller nulle part. Ça vie se résumait à ça. Il dormait jusqu'à pas d'heure, puis il vagabondait, oiseau migrateur de la ville, vautour éternisé par les années, tout le monde le connaissait, personne ne le voyait. Il aurait pu mourir qu'on s'en serait rendu compte que lorsque les huissiers auraient défoncé sa porte pour saisir ses quelques affaires, avec tout les impayés qu'il accumulait.. Son t-shirt blanc, sur lequel coupait net à tout discours une tête carré, aux yeux en croix, lui paraissait trop grand, bien que sa taille fut d'1m80. Sa tenue n'allait pas dans le sens des sourires qu'on peut attendre en marchant dans les rues. Il était contre ça. Il se plaisait à aller devant les écoles, pour se rappeler le temps où lui aussi était petit, qu'il était le centre d'intérêt de sa mère et que l'avenir lui paraissait radieux et gorgé de belles surprises. Puis vient le jour où on choisit.
Volutes de fumée, belles mais irrattrapables, il voulait partir dans le Ciel. En faisant cuire ses pâtes, il écoutait des musiques, aux notes sournoises et insolentes, électriques et qui lui saisissaient le cerveau.
Puis il se mettait à table, une seule assiette, sur la nappe blanche aux taches de vin et aux trous de cendres. Face à la fenêtre, qui plongeait la pièce dans une double face, un côté lumineux et un côté sombre. Assis dans l'obscurité, il regardait la lumière, et ses yeux brillaient d'un intérêt subtil pour les choses qu'il ne connaissait pas, celles qui appartenaient à la lumière. Ces particules qui flottaient devant lui, petits grains de poussière, indifférentes à cet être, elles étaient des milliers et lui était seul.