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Zigzag

par Mr. Kanard

"L'hôtel s'éloignait, la route avançait. Derrière, ce joli petit renard perdu en pleins Paris avais agité la main en signe d'adieu. C'était les lampadaires abîmés, clignotants qui disaient ainsi au revoir. Le taxi parti se mêler à la circulation nerveuse, et mon client se tournait à chaque feux rouges, essayant d'attraper de ces yeux ternis par la séparation, le fantôme de cette femme qu'il appelait Ambre. J'étais encore le témoin du théâtre des vies, dont ma voiture était la scène, et moi l'unique privilégié de ces moments marquants comme les traces des pneus que je laissais en freinant brusquement, pour éviter de renverser le couple qui passait se tenant la main. Quelle ironie pour mon Monsieur, avec sa chemise en laine et son casque d'écoute gigantesque autour du cou. Je lui mit un petit air de jazz, ça le calmerait, on m'avait dit de l'emmener à Charles de Gaulle, et il nous fallait d'abord atteindre le périphérique. Le monde défilait, et nous défilions aussi, tout défilait, rien ne se correspondait. Ces pavillons n'étaient rien, ils pouvaient se détruire n'importe quand, les habitant, disparaître au moindre problème. Toutes ces infra-structures! Les panneaux, stoïques depuis leur naissance, se contentaient de montrer la marche (le roulement) à suivre. Qui imaginait que dans ma voiture, un homme ne pouvait être satisfait par tout ce que l'Homme avait pris le temps, la bêtise, l'argent, la réflexion d'inventer, rien de tout ça ne pouvait sécher les larmes qui tombaient sur son cœur. Je lui jetais un coup d'oeil par le rétro. Le teint basané, indien sûrement, il regardait dehors sans voir ce qu'il y avait, et je serais bien parti pour le consoler...

- Allez man ! Tu vas voir, ça va s'arranger ! Ça faisait combien de temps que tu étais avec ton renard ?

 

Il tourna la tête, et nos regards se croisèrent indirectement, séparés par le rétroviseur. Dehors, c'était un film qui se déroulait. Chaque choses avait son contexte et leurs histoires, c'est ce qu'on s'évertuait à dire, mais le film qui se tournait à côté de moi était un amas de commerces, des cyclistes courageux, et de marcheurs. Chacun vivaient ensemble, tout le monde s'ignorait, on se serait cru dans un film muet noir et blanc, aucune communication, et seulement de l'observation... Mais personne ne se regardait réellement, tout le monde gardait le nez fixer par terre. Mon taxi était une sorte de soucoupe, une mise en 40 aine pour voir le monde extérieur depuis l'abri. Enfin, je m'évertuais à ce qu'il en soit un. Et le remuement de mon « bolide Â» berçait les voyageurs qui s'aventurait sur les routes sous ma tutelle. Tout s'effaçait, partait derrière, on prenait une sorte de plaisir à regarder toutes ces histoires, preuves que le monde vivait, même si ce n'est pas dans le bon sens.

Il me parla, de cette femme qu'il avait rencontré, de leur rêves de voyage, de leur jolie petit amour baladant, et puis des complications, les embrouilles, d'accord sur rien, et plus de thunes...

Vide de sens derrière nous, devant, nous pouvions toujours colorer ce chemin immense, et roulant pour l'aéroport, je lui parlais des gens qui se levaient et partaient, du jour au lendemain, et que si il voulait, je pouvais l'emmener loin de ces effluves urbaines... Chose qu'il accepta.."

 

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